Un beau coeur

24 janvier 2021

Voici une allégorie inspirante. Je n’en suis pas l’auteure. Je l’ai entendue dans une conférence où intervenait Yannick Alain. Je la retranscris ici.

Il était une fois dans un village un jeune homme qui attirait les regards de tous les passants sur lui, car il s’écriait à pleins poumons: « J’ai le plus beau cœur au monde ! Qui aimerait voir mon cœur ? J’ai le plus beau cœur au monde ! Oyez ! Oyez ! Approchez ! Je m’apprête à vous montrer le plus beau cœur au monde. »

Il criait si fort et avait l’air tellement convaincu de posséder un trésor avec ce coeur qu’il disait incomparable que, peu à peu, les gens, intrigués et voulant voir ce phénomène, s’attroupèrent autour de lui. Bientôt des centaines de villageois l’entouraient et, lorsqu’il y eut assez de personnes, le jeune homme plongea la main dans son manteau et il en sortit son cœur.

Les gens furent très surpris parce qu’effectivement, le jeune homme avait raison : c’était le cœur le plus éclatant, le plus brillant qu’ils aient jamais vu. Sa couleur était exceptionnelle, sa forme sans aspérité, sans aucune égratignure, sans aucune imperfection. Les gens étaient vraiment très impressionnés et tous étaient unanimes. Bref, les éloges pleuvaient : c’était une véritable merveille!

Le jeune homme était très fier et se vantait encore plus de son cœur parfait. Cependant, alors que personne ne s’y attendait, une voix s’éleva dans la foule : « Mon cœur est plus beau que le tien, jeune homme! ».

Les villageois se demandèrent qui avait osé prononcer ces paroles incroyables et cherchaient dans la foule l’impertinent. Ils aperçurent alors un vieillard dont la mine était sans prétention. Tous le regardaient avec cet air de dire : « Comment cet homme peut-il prétendre avoir un plus beau cœur que celui de ce jeune garçon? » Et le jeune de dire : « Si votre cœur est plus beau que le mien, vieil homme, et bien, venez-nous le montrer. »

Alors le vieil homme s’avança d’un pas lent mais assuré jusqu’au centre de la foule et lentement entra la main dans son manteau et en sortit son cœur. À la vue du coeur du vieillard, le jeune éclata de rire : « Sauf votre respect, vieil homme, comment pouvez-vous dire que votre cœur est plus beau que le mien? Certes, il bat puissamment mais il est plein de cicatrices! Il est tout irrégulier, tout rapiécé et ses coins sont déchirés. Il y a même des endroits où il manque des morceaux. Non, sérieusement, vous plaisantez?! Votre coeur est dans un triste état! Vous ne savez pas ce que vous dites. »

Les villageois partageaient l’opinion du jeune homme : non mais vraiment, ce vieillard avait perdu la tête!

Le vieil homme les regarda tous avec beaucoup d’amour et dit : « Oui, tu as raison, mon jeune ami : ton cœur est en effet très beau, mais je ne voudrais pas l’échanger avec le mien. Tu vois sur mon coeur chaque cicatrice, chaque égratignure représentent une personne à qui j’ai donné mon amour : ce sont toutes les fois où j’ai aimé et que j’ai peut-être été déçu, blessé ou que ça n’a pas fonctionné. Chaque morceau rapiécé que tu vois, ce sont toutes les fois où j’ai donné un petit morceau de mon cœur à quelqu’un d’autre et, en échange, il m’a retourné un morceau du sien. Ces accrocs, c’est moi qui les ai faits lorsque j’ai déchiré des morceaux de mon cœur et que je les ai donnés. En retour, certaines personnes m’ont donné un morceau de leur cœur mais ces morceaux ne sont pas exactement les mêmes. Les coins sont déchirés, je suis d’accord avec toi, mais cela me rappelle que nous avons partagé de l’amour les uns pour les autres.

Les trous que tu vois, jeune homme, ce sont toutes les fois où j’ai pris des risques, où j’ai cru en mes rêves, où j’ai cru en moi et que j’ai osé les réaliser et que ça n’a peut-être pas fonctionné. Ce sont aussi toutes les fois où j’ai donné un morceau de mon cœur à quelqu’un d’autre, mais qu’il ne m’a rien donné en retour. Ces échecs ont laissé des trous. Ce sont les trous que tu vois là. Donner son amour comporte des risques. C’est pourquoi ces trous restent ouverts. Cela me rappelle que j’ai de l’amour pour ces gens. Un jour, ils reviendront peut-être pour y mettre leur pièce.

Alors, lorsque je regarde mon cœur, jeune homme, je vois un cœur qui a aimé, je vois un cœur qui a risqué, je vois un cœur qui a donné. Vois-tu maintenant ce qu’est la vraie beauté ? »

Le jeune homme ne savait que dire et des larmes coulaient le long de ses joues. La foule aussi était émue. Alors le jeune homme prit son cœur dans sa main et en déchira un morceau. Il l’offrit au vieillard avec des mains tremblantes. Le vieil homme prit le morceau, le déposa sur son propre cœur. Il en prit un morceau à son tour pour combler la plaie dans le cœur du jeune homme. Ce morceau ne s’ajustait pas parfaitement au trou dans le coeur du jeune homme, mais ce dernier regarda son cœur qui n’était plus parfait, et il le trouva beau, beaucoup plus beau qu’auparavant parce que l’amour du vieil homme circulait dans son propre cœur.

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